Chef d’œuvre de l’art Mussipontain : le retable de Philippe de Gueldre

Un des chefs d’oeuvre de l’art Lorrain. La duchesse de Lorraine Philippe de Gueldre.

Ce retable est authentifié et classé au Patrimoine culturel de Lorraine. Il se trouve dans l’église Saint-Laurent à Pont-à-Mousson. Cette oeuvre d’une beauté exceptionnelle, dont l’objet n’est pas d’ordre décoratif, fut conçue au service de la foi, en soutien d’une spiritualité ardente en cette fin du moyen âge et à l’aurore de la Renaissance. 

Retable église Saint Laurent

L’objet classé de l’église Saint-Laurent abrite un retable peint du XVIe siècle

L’objet classé de l’église Saint-Laurent abrite un retable peint du XVIe siècle, commandé par la duchesse de Lorraine Philippe de Gueldre à un atelier anversois. Cette œuvre se trouvait à l’origine dans le couvent des clarisses détruit en 1790.

L’ichonographie du triptyque avec pour thème d’entrée un cycle Marial et pour thème principal la Passion du Christ, traduit la spiritualité de la Duchesse de Lorraine Philippe de Gueldre (1464-1547) qui épousa René II en 1485. Ce retable illustre des scènes des évangiles et des textes de la légende Dorée, complétées par des scènes de l’ancien testament.

C’est un triptyque anversois, daté de 1543, réalisé par un atelier flamand non connu. Ses dimensions, volets ouverts sont : largeur 4,80m, hauteur 2.40m, profondeur 30 cm. Ce retable est un retable à transformation comportant 22 scènes principales. La partie centrale est composée de six registres sculptés. Les deux volets articulés, portent des scènes peintes sur leurs deux faces (10 tableaux, volets ouverts et 6 tableaux, volets fermés).

Une ichonographie en trois séquences

L’iconographie du triptyque comporte 3 séquences : La Passion du Christ (thème principal), une séquence mariale (Marie et Jésus enfant) et une séquence sur la vie publique du Christ. Une même séquence comporte quelquefois des scènes peintes et des scènes sculptées.

Ce retable, peu connu du public, fait partie des plus beaux retables anversois datant de la même époque. Ces retables sont caractérisés par une conception générale de la fin du gothique et une influence maniériste déjà toute imprégnée de l’élan de la Renaissance.

Ce retable est composé de séquences dignes d’un scénario dans lequel la dernière scène renvoie à la première, pour bien marquer la fin d’une même histoire. L’histoire que l’historien Jean Magnin intitule « le Salut à Marie ».

L’église Saint-Laurent fut fondée en 1230, mais il ne reste rien de la nef primitive, très basse et construite dans le style gothique le plus simple. Le chœur et le transept, de style flamboyant, sont du XVe et XVIe siècles. C’est dans ce style que furent reconstruits à partir de 1822, par le chanoine Huraux, curé, la nef et les bas-côtés actuels.

Le portail central et les deux premiers étages de la tour sont du XVIIe siècle. En 1900 enfin, la façade fut élargie, et la tour surmontée du campanile actuel. On remarquera à l’intérieur, les belles voûtes à clefs sculptées et les larges verrières de l’abside et du transept, ainsi de l’intéressant ensemble de statues et objets mobiliers. Des travaux de rénovation furent terminés récemment grâce à la générosité d’un donateur privé.

Des visites de l’église Saint Laurent son disponibles en s’inscrivant à l’Office de Tourisme du BPAM. Visites sur RDV.

Le retable

Philippe de Gueldre, la princesse, la duchesse.

Qui était Philippe de Gueldre ?

La vie de princesse de Philippe

Au XVIème siècle, la famille d’EGMONT régnait sur le duché de Gueldre, aujourd’hui province des Pays Bas, faisant frontière avec l’Allemagne, la ville de GUELDERN est aujourd’hui en RHENANIE DU NORD, au sud d’HARNHEM.

La mère de Philippe est de sang royal et compte dans ses ascendants SAINT LOUIS et JEAN le BON, ils sont donc de la famille capétienne. Ses parents sont  Adolphe d’EGMONT et Catherine de BOURBON, mariés en novembre 1463, la naissance de leur fille PHILIPPE serait de fin 1464, la date est incertaine. Son parrain est le  Duc de Bourgogne PHILIPPE le BON, qui lui donne son prénom. Philippe est un prénom qui n’a pas de genre comme Camille, Dominique, Claude et signifie : ami des chevaux.

Sa mère Catherine eut encore un fils CHARLES, et elle mourut prématurément en 1469 laissant deux orphelins de 5 et 2 ans. Ils seront élevés par leur tante paternelle, Catherine de Gueldre, qui les élève dans une grande piété.

Son père, Adolphe, est le fils du Duc Arnold qui règne toujours, mais Adolphe est pressé de prendre sa succession ; l’histoire l’a surnommé ” le dénaturé”, nous allons voir pourquoi.

Adolphe cherche à destituer son père ; au pays de Gueldre chacun a ses partisans, on se bat puis on cherche une réconciliation au cours d’un festin le 9 janvier 1465. Mais c’est un piège : Adolphe fait arrêter  son père, le mène en prison et se fait reconnaître  comme Duc régnant  avec la protection du Duc de Bourgogne régnant, Philippe le Bon, dont il est le vassal. En 1470, son successeur, Charles le Téméraire, propose un arbitrage : Adolphe gouvernerait et son père, Arnold, garderait le titre de Duc. La réponse d’Arnold est cinglante : «  j’aimerais mieux jeter mon père dans un puits et m’y jeter ensuite, il y a 44 ans qu’il est Duc, il est  temps que mon tour arrive. »

Le père est outragé, l’autorité du Duc bafouée et le Duc Charles le Téméraire  met le fils Adolphe en prison. De son côté le Duc régnant, Arnold, dépouille son fils  et ses descendants, c’est à dire Philippe et son frère Charles, et vend pour 8000 écus, au Duc de Bourgogne, ses droits sur la Gueldre. Nous sommes le 7 décembre 1472, et trois mois après le Duc Arnold meurt.

Philippe et son frère sont orphelins, âgés de 5 et 9 ans, sans héritage, et séparés de leur mère adoptive.

Ils sont alors accueillis à la cour de Bourgogne, à Gand, et sont élevés par la troisième épouse du Téméraire, Marguerite d’York, en compagnie de MARIE de BOURGOGNE, fille unique de la deuxième épouse du Téméraire. Les trois enfants vivent ensemble à la cour de Bourgogne qui passe  pour une des plus brillantes d’Europe.

Cette vie dorée fut brève : 5 ans. En 1477 Charles le Téméraire est tué à la bataille de Nancy; il n’a qu’une fille, Marie de Bourgogne, héritière du titre, il est donc urgent de la marier. On songe alors à Adolphe EGMONT, père de Philippe.                                   

On le sort de prison, on le met à la tête d’une armée, et il est tué à la bataille de TOURNAI le 27 juin de la même année. Finalement  cette Marie de Bourgogne eut un mariage digne de son rang, elle épousa Maximilien 1er d’Autriche et mourut jeune à l’âge de 25 ans. De cette union impériale allait naître un fils Philippe IV de Bourgogne (Philippe I de Castille) et une fille Marguerite d’Autriche.

Notre jeune Philippe se trouve alors prise dans un jeu politique : par le traité d’ARRAS 23 décembre 1482, Maximilien destine sa fille Marguerite au Dauphin de France et le traité précise qu’elle doit être élevée – jusqu’à son mariage – à la Cour de France.

Il lui faut une suite et Maximilien choisit Philippe, l’amie de sa femme ; elle a 18 ans, et toutes ces princesses se retrouvent à la Cour de France, à AMBOISE, qui n’a pas les fastes de la Cour de Bourgogne. Finalement ce mariage avec le Dauphin ne se fit pas et Philippe se retrouve seule à AMBOISE.

Chef d’oeuvre de l’art religieux

La vie de duchesse de Philippe

Mais que se passe-t-il en Lorraine ?

René II vainqueur du Téméraire est âgé de 26 ans, il a épousé Jeanne d’HARCOURT le 9 septembre 1471 mais s’en est séparé rapidement car elle est impuissante à remplir le devoir conjugal. Pour les juristes soucieux du détail, l’impuissance n’est pas la stérilité, c’est un terme précis qui désigne une difformité physique et perpétuelle et c’est une cause de déclaration de nullité  de mariage en droit canon.  René II est évidemment soucieux d’assurer sa descendance et s’adresse à l’Evêque de TOUL pour engager la procédure en 1480 et obtient l’annulation de son mariage le 9 août 1485.

A la Cour de France nous sommes à la fin du règne de Louis XI qui meurt en 1483. René II a acquis une renommée considérable à la suite de sa victoire et fréquente la Cour de France pour des raisons de géopolitique qu’il est inutile d’expliquer ici. Est-ce Louis XI avant sa mort ou sa fille Anne, Régente, qui imagine le mariage de Philippe, on ne sait. Philippe est jeune, belle, mais très religieuse et son désir est de rentrer dans les ordres. Le Roi de France va décider pour elle.

Les souverains français ont toujours eu le souci de préserver leurs frontières à l’Est de la Champagne.

René II vient d’éviter la jonction de la Flandre et de la Bourgogne et il convient de garder ses faveurs. René II n’a pas d’héritier. Il a déjà rencontré Philippe à la Cour et la régente va proposer à René II d’épouser Philippe et il accepte. Le contrat de mariage est signé le28 août et célébré à ORLEANS le 1er septembre. C’est une fête royale pendant laquelle « la cour s’épuisa en joie et en compliments » dit la chronique.

Le bonheur  des jeunes époux fut très vite troublé. La famille d’Harcourt se trouvant offensée, obtient  du Pape Innocent VIII l’annulation du jugement de l’Evêque de TOUL. En conséquence Philippe et René sont en concubinage ce qui n’est pas très catholique. René II intervient à son tour à ROME et finalement trois ans plus tard le 30 janvier 1489 la bulle déclarant l’invalidité est prononcée, le mariage de Philippe et René est confirmé. Il faut dire aussi que Jeanne d’Harcourt est décédée trois mois avant, et le nouveau mariage confirmé est célébré à NANCY le 11 décembre 1489.

Philippe devient donc pour tous Duchesse de LORRAINE et de BAR, Reine de Sicile et de Jérusalem, titres qui pour ces derniers sont purement honorifiques et ne sont que des droits à faire valoir.

Les époux ont une vie exemplaire, profondément religieux, irréprochables dans leurs bonnes mœurs bons envers leurs sujets René II fait la guerre aux Messins tandis que Philippe assure la descendance attendue.

12 enfants vont naître de l’union en 20 ans :

  1. Charles, né à NANCY, mort en bas âge.
  2. François, né à PONT-A-MOUSSON, mort à l’âge de 2 ans et enterré à Pont-à-Mousson (place St Antoine près de la collégiale Ste Croix).
  3. ANTOINE, qui succèdera à son père (duc de 1508 à 1544)

1490    Anne, née à BAR                      }

1493    Nicolas, né à NANCY                   } morts en bas âge

1494    Isabelle, née à LUNEVILLE          }

  1. CLAUDE, né à CUSTINE, qui sera le premier Duc de Guise et chef de cette famille qui va s’illustrer en France pendant la guerre de religion. Il possédait le fief de Guise et s’étant illustré à la bataille de Marignan François 1er  lui conféra le titre de 1er duc de Guise.

1498    JEAN,  cardinal, évêque de TOUL de METZ et de VERDUN

  1. Louis, né à BAR, futur Evêque de VERDUN, mort au siège de NAPLES en 1528
  2. Claude et Catherine, sœurs jumelles, mortes en bas âge
  3. François, né à BAR, tué à la bataille de PAVIE  en 1525

L’éducation des enfants est confiée à Jacques VANIS de NIMEGUE. C’est un fervent catholique et si l’on juge un arbre à ses fruits, son fils fut une jésuite célèbre surnommé le « marteau de l’HERESIE » et canonisé par Pie XI.  Les enfants étaient donc entre bonnes mains.

Les descendants directs, vont aussi manipuler le sabre et le goupillon avec succès.

Parmi les enfants de Claude 1er Duc de Guise (marié à Antoinette de Bourbon) nous trouvons :

Marie        future Reine d’Ecosse et mère de Marie Stuart

François   2ème Duc de Guise, Duc d’AUMALE – Vainqueur à METZ (1552) de l’Empereur d’Allemagne Charles Quint.

Louise      Princesse de CHIMAY

Renée      Abbesse de Saint-Pierre de REIMS

CHARLES  le grand Cardinal de LORRAINE

Très influent à ROME pendant  le concile de Trente et en France où il voulait instaurer l’inquisition ce qui fut refusé par la Régente Marie de MEDICIS. C’est grâce à son influence que fut créée l’Université de PONT-A-MOUSSON.

Claude       marquis de Mayenne épousa la fille de Diane de POITIERS

Louis          Cardinal de Guise

Antoinette   Abbesse de FARMOUSTIERS

François      grand Prieur de MALTE, général des Galères

René           marquis d’ELBEUF

Le fils aîné de François, (deuxième duc de Guise) Henri 1er de Guise fut chef des ligueurs et assassiné à BLOIS en 1588 avec son frère, le Cardinal Louis.

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Publié par Guy Ros

Guy Ros directeur d'agence de tourisme, écrivain et essayiste.

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